Longtemps, Rozenn Fontanel a conseillé de grandes entreprises en stratégie d’implantation et gestion de la relation client. Aujourd’hui, ce sont les particuliers qu’elle accompagne vers une consommation plus responsable dans son épicerie en vrac day by day. Une reconversion qui lui permet de pratiquer un métier totalement en phase avec ses valeurs profondes.
Chaque matin désormais, Rozenn Fontanel se réveille avec le sourire. Son premier magasin day by day va fêter ses trois ans et depuis qu’elle s’est lancée dans cette aventure, elle se sent pleinement en phase avec ses valeurs. Ce concept d’épicerie en vrac, elle y a cru fort tout de suite. Parce que bien au-delà d’une simple boutique, c’est un mode de vie global, respectueux de l’environnement, que véhicule l’enseigne. « Aujourd’hui, je suis heureuse de promouvoir cet engagement, cette volonté d’aller vers le zéro déchet. Une véritable communauté se crée autour des magasins day by day et à chaque fois qu’un·e client·e pousse la porte et me dit simplement « bonjour Rozenn », cela me met du baume au cœur ! Parce que consommer différemment est un acte militant, je suis heureuse de proposer des solutions à ceux qui ont envie d’agir. Comme l’anthropologue américaine Margaret Meadle le disait fort justement : « Ne doutez jamais qu’un petit groupe de citoyens engagés et réfléchis puisse changer le monde, en réalité c’est toujours ce qui s’est passé ». J’en suis intimement persuadée ! » indique-t-elle.
« Dès la prime enfance, mes parents m’ont appris la valeur des choses »
Petite dernière d’une famille de six enfants, Rozenn apprend très tôt la valeur des choses. « A la maison, on ne gaspillait pas, on faisait attention aux affaires et à ce que l’on consommait. Cet état d’esprit ne m’a jamais quittée » reconnaît-elle. Parallèlement, la jeune fille s’épanouit dans le sport, qu’elle pratique en compétition, plus précisément la natation sur longue distance et l’aviron. « J’aime gagner, me battre, je suis tenace, je ne lâche rien ! » précise-t-elle. A l’école, cette élève qui se définit comme sérieuse a des ambitions et se donne les moyens de les atteindre. « J’avais envie de travailler dans le monde de la statistique appliquée. Après un bac B (ES), j’ai enchaîné Deug d’Economie, DUT de Statistique, Maîtrise d’Econométrie et DEA de Stratégie et Gestion Commerciale » raconte-t-elle. Elle qui voulait initialement devenir démographe s’oriente finalement vers la modélisation du comportement des consommateurs, et entame une carrière dans le conseil en stratégie d’implantation de réseaux commerciaux et gestion de la relation client. Pendant une vingtaine d’années, elle relève ainsi de beaux défis pour de grandes enseignes. Mais un jour, tout bascule. Confrontée à une situation de harcèlement moral, elle décide dans un premier temps de tenir bon. « Je me suis dit : accroche-toi, il n’y a pas de raison que tu n’arrives pas à surmonter cela, tu as toujours réussi à triompher des difficultés. Mais hélas les choses n’ont pas tourné ainsi. Un matin, mon être tout entier a dit stop, avec à la clé un burn-out » se souvient-elle.
« Je me suis rendu compte que mon travail n’était plus du tout en phase avec mes valeurs »
Rozenn se soigne, prend du recul et s’interroge alors sur son avenir. Car, à l’approche de la cinquantaine, elle ne se voit pas continuer comme ça. « Cela a été très douloureux mais très riche. J’ai tout remis en question. Moi qui m’étais toujours donnée à fond dans mon travail, je me suis demandé : tout ça pour quoi ? Suis-je encore en phase avec mes valeurs ? Je ne l’étais plus du tout en fait : les problématiques que je traitais, passionnantes au demeurant, visaient à aider mes clients à vendre toujours plus. Alors que, au niveau personnel, j’étais dans une phase où je voulais au contraire m’éloigner de ce modèle de consommation effrénée. A cette époque, une phrase de Matthieu Ricard m’a beaucoup fait réfléchir : « Pour pouvoir changer le monde, il faut avoir trouvé un sens à son existence puis essayer de le partager ». Elle m’inspire encore beaucoup aujourd’hui ! » commente-t-elle. Rozenn prend alors le temps de négocier son virage, en commençant pas décélérer : elle cultive son jardin, fait des confitures, de la méditation, du tai-chi… En pleine phase de reconstruction, elle tombe alors sur un reportage télé où une jeune femme raconte comment, après une carrière dans le merchandising, elle s’apprête à ouvrir une épicerie en vrac de la franchise day by day. « Je me suis dit : c’est génial ! Et j’ai trouvé de nombreux points de correspondance avec mon histoire. Car moi aussi, je m’intéressais beaucoup à la thématique du zéro déchet et je venais de dévorer le livre de Bea Johnson. Tout ceci correspondait aux valeurs que j’avais envie de mettre en pratique et de transmettre à mes enfants. Je suis alors partie à la découverte de ce nouvel univers : je me suis documentée, j’ai participé à des réunions, j’ai rencontré l’équipe day by day… et j’ai enfin mis le pied à l’étrier en faisant deux jours d’immersion dans un de leurs magasins » relate-t-elle.
« J’ai signé le bail de ma boutique au moment où je fêtais mes 50 ans »
Cette première expérience se passe si bien que la responsable de la boutique lui demande si elle veut lui donner un coup de main certains samedis. Rozenn prend alors sa décision, monte son projet et se met à chercher un local : ses compétences en géomarketing lui sont alors d’une aide précieuse. Habituée à manipuler les chiffres dans son ancienne vie, elle construit son business plan avec enthousiasme et va toquer à la porte des banques sans stresser. « J’ai signé le bail de mon local et mon contrat de franchise au moment où je fêtais mes 50 ans ! Cela va faire trois ans, le 31 mai prochain, que les portes de day by day Cambronne se sont ouvertes pour la première fois : c’était à l’époque le 14ème magasin de l’enseigne en France, il y en a aujourd’hui une petite cinquantaine. Depuis, mon mari Stéphane m’a officiellement rejointe dans l’aventure et nous avons repris un second magasin dans le quartier des Batignolles, en février 2023 » indique-t-elle.
« Ce projet a apporté de l’oxygène à toute la famille »
Cette reconversion, les proches de Rozenn l’ont soutenue. « Mon mari et mes enfants étaient heureux car ils me voyaient revivre à travers ce projet. Nous sortions d’une année très dure et cela a apporté de l’oxygène à toute la famille : ils furent donc mes premiers supporters ! Les amis du premier cercle me félicitaient quant à eux de prendre cette décision radicale, courageuse et de remettre tout en question » se remémore-t-elle. Car Rozenn n’a pas seulement changé de métier, elle a changé de vie. Aujourd’hui elle travaille le samedi et le dimanche matin. Plus grave pour certains, elle a perdu le statut social que lui donnait son ancien job et, même si avec le recul elle s’en moque désormais, au départ elle ne savait pas si elle assumerait cela, si elle serait capable d’affronter le regard des autres. A l’image de ceux qui, en ricanant, lui ont dit « Sérieusement, tu quittes ton métier, toi qui dirige une BU et qui siège au Comité de Direction, tout ça pour aller jouer à la marchande ? ». Heureusement, ces considérations lui semblent dérisoires après trois ans d’activité. « J’ai découvert ce que c’était de créer et gérer une petite entreprise : on fait tout, de A à Z, des finances à la logistique, de la communication à la relation client… C’est passionnant mais chronophage et cela exige beaucoup d’énergie. Je dois veiller à ne pas retomber dans l’excès et me préserver un peu, mais pour l’heure je me donne à fond. Et puis, même si je m’étais promis de ne jamais travailler avec mon mari car nous avons deux caractères bien trempés, je suis heureuse d’avoir finalement fait ce choix : ce n’est pas simple tous les jours, mais après 25 ans de mariage nous vivons ensemble une très belle aventure » ajoute-t-elle.
« J’apporte ma petite pierre à l’édifice »
Son parcours atypique interpelle, et Rozenn se voit régulièrement sollicitée pour parler de sa reconversion et prodiguer des conseils. Elle accueille même à son tour des candidats à l’ouverture d’une franchise day by day. « Souvent, ce sont des jeunes actifs, des trentenaires… moi, j’ai attendu la cinquantaine pour tout changer, mais je ne regrette rien. J’ai aimé mon ancienne vie professionnelle, il y a juste un temps pour tout ! La première chose que je dis à ceux qui m’interrogent est d’aller vers quelque chose qui leur permettra d’être heureux le matin, au réveil, à l’aube de leur journée de travail. Il faut prendre du plaisir dans ce que l’on fait, et que ce plaisir soit supérieur aux contraintes associées car ne rêvons pas, tout métier comporte des contraintes ! Ensuite, à chacun ses critères, à chacun son curseur. Par exemple, si on reprend une épicerie comme la mienne pour gagner beaucoup d’argent, ça ne va pas le faire ! Mes revenus actuels n’ont rien à voir avec ceux d’avant mais cela m’importe peu, en tout cas beaucoup moins que ce que je veux laisser derrière moi et que la sauvegarde de notre planète. J’ai toujours aimé conseiller : aujourd’hui, ce sont mes clients que j’accompagne sur la manière de consommer de façon plus responsable. J’apporte ainsi ma petite pierre à l’édifice. Et nous sommes de plus en plus nombreux ! » conclut Rozenn dans un sourire.
– Texte © Corinne Martin-Rozès –
– Photos © Rozenn Fontanel –
– Texte et photos ne sont pas libres de droit –
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Catégories :Reconversion
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