Vingt années passées dans l’industrie biomédicale et une pression trop forte dans son dernier poste : à 46 ans, Valérie Ladavière décide de tourner la page pour se consacrer à sa passion de toujours, la photo.
De son enfance, Valérie Ladavière se souvient avoir beaucoup grimpé dans les arbres… Un peu garçon manqué, très sportive, la petite fille commence à faire des photos très tôt, à 8 ans, lorsqu’elle reçoit un appareil pour Noël. « Mon premier portrait fut celui de ma mère, et j’ai été si maladroite que je lui ai coupé la tête ! A la réception des tirages, je me suis dit, plus jamais ça. Et depuis, je n’ai pas cessé d’apprendre, tout en continuant à privilégier les portraits rapprochés, où j’essaye de capter le regard des gens » raconte-t-elle. A quinze ans elle quitte Tours pour Paris, passe un bac littéraire puis enchaîne sur une fac d’histoire avant d’arrêter pour se consacrer au théâtre. Elle rejoint alors la troupe de Lorraine Lévy, avec qui elle tourne pendant une année, et s’inscrit au Cours Galabru. « A cette époque, j’ai rencontré mon mari et, très vite, j’ai eu mon premier enfant. Puis j’ai estimé que ces deux vies n’étaient pas compatibles, que ma passion du théâtre ne pouvait pas cadrer avec ma vie de famille. Je ne voulais pas faire l’une ou l’autre chose à moitié, alors j’ai choisi d’arrêter le théâtre ».
« J’avais alors 46 ans et je me suis dit : c’est l’occasion où jamais »
Très vite cependant, Valérie se remet à chercher du travail, « parce que je suis quelqu’un d’actif et que je souhaitais avoir mon indépendance ». Issue d’une famille de médecins, elle se tourne assez naturellement vers ce secteur et suit alors une formation de visiteuse médicale. S’ensuivent vingt années comme directrice commerciale dans l’industrie biomédicale. La pression, les déplacements, les objectifs : elle gère tout jusqu’au jour où, moralement et nerveusement épuisée, elle décide de changer de vie. « J’avais alors 46 ans et je me suis dit : c’est l’occasion où jamais : vas-y, fonce, fais ce que tu aimes ! » Pour la petite histoire, c’est un mariage qui fait office de déclic. Valérie est à la fois témoin et reporter photo pour l’événement. Elle réalise ensuite pour son amie un livre grand format noir et blanc avec ses meilleurs clichés du jour J. « J’étais encore indécise mais elle m’a convaincue de me lancer. Je lui ai opposé qu’il y avait déjà beaucoup de photographes sur le marché, à quoi elle a répondu que j’apportais autre chose, un regard qu’elle n’avait pas trouvé ailleurs. Et le fait est que, lorsque je regarde les sites d’autres photographes notamment sur les mariages, je n’ai pas l’impression de faire la même chose qu’eux… Chez moi aucune photo posée, mais un reportage tout au long de la journée, sur le vif » explique-t-elle. Elle se met alors à photographier ses proches, famille, amis, amis d’amis, puis décide de mettre en chantier un projet qu’elle caressait depuis longtemps.
« Dynamisée par les encouragements de ses proches, Valérie persiste dans sa détermination »
« Les seniors de ma petite ville se réunissent deux fois par semaine dans une association et j’avais envie de faire une galerie de portraits pour leur rendre hommage. Je me suis jetée à l’eau, j’ai contacté la présidente de l’association et la mairie de Buc : non seulement tout le monde a été d’accord, mais j’ai pu présenter mon travail lors d’une exposition, dans le cadre du Printemps des Artistes » poursuit-elle. Dynamisée par les encouragements de ses proches, unanimes pour lui dire à quel point elle a raison d’y croire, Valérie persiste dans sa détermination. « Je n’ai pas suivi de formation, car je pratiquais déjà depuis fort longtemps, en amatrice passionnée. Tout s’est fait naturellement ». Elle monte alors sa petite entreprise et, à partir de là les premières commandes s’enchaînent : mariages, soirées, portraits de famille, mais également portraits d’entreprise, de préférence en noir et blanc, par goût, mais pas exclusivement. « J’aime avant tout photographier les gens, quel que soit le contexte, dans la sphère privée ou dans l’univers professionnel. Là où de nombreux photographes recherchent les ombres et les lumières qui rendront la photo exceptionnelle, ce qui me procure un plaisir immense c’est de capter dans le regard de mon sujet l’étincelle qui fera toute la différence. Fixer sur la pellicule l’instant propice, unique, qui en fera une ‘’belle personne’’. Disons que je suis plus passionnée par la personnalité que par l’esthétique. Ma priorité n’est pas le stylisme mais bien le petit supplément d’âme que je cherche à mettre en lumière chez mes sujets » indique Valérie.
« Mes réussites d’avant ne peuvent se comparer avec la satisfaction que je ressens aujourd’hui à rendre mes clients heureux »
Aujourd’hui, deux ans après les premiers pas, Valérie tire un bilan très positif de son changement de vie. « C’est un confort psychique incroyable de travailler pour soi. Ça change la donne, même si les incertitudes financières sont génératrices d’inquiétude ! En revanche, je suis très exigeante avec moi-même et chaque jour, je fais en sorte d’être productive, constructive, de mener à bien des choses concrètes. Ce n’est pas parce que l’on est à son compte qu’il faut se relâcher, au contraire. Cela tombe bien car j’ai du travail, puisque je fais tout ou presque moi-même, y compris le développement commercial de l’activité. Financièrement, bien sûr, rien à voir avec mes revenus d’avant, car je gagnais très bien ma vie dans mon ancien job. Mais les bénéfices de la nouvelle configuration sont énormes : pour commencer, je me sens enfin moi-même et je ne suis plus sur les routes à longueur de semaine. Cela change tout ! » Quand on l’interroge sur l’avenir, elle avoue fourmiller de projets mais ne pas être très forte sur le ‘’demain’’, préférant vivre dans l’instant. « J’espère que cela sera viable sur le long terme. Si je dois un jour retourner vers un job salarié, par contrainte financière, je le ferai, mais j’espère que ça ne sera pas nécessaire. Quand j’étais directrice commerciale, si je remportais un gros contrat, j’étais contente mais cela n’a rien à voir avec la satisfaction que je ressens aujourd’hui à voir mes clients heureux quand ils découvrent leurs photos. Pour résumer, je ne veux plus rien changer. Et dans dix ans ? Je me vois pareille…en mieux ! » plaisante-t-elle.
« Je vois encore trop de personnes insatisfaites qui, depuis des années, se plaignent de leur vie sans rien faire pour que cela change »
Lorsqu’elle est questionnée sur le sujet de la reconversion, Valérie est formelle : « Si la personne a passé la quarantaine, je lui dis que c’est maintenant ou jamais ! Pour avoir dit adieu au théâtre il y a bien longtemps, je sais à quel point on peut regretter de ne pas être allé au bout de son rêve. Quand vous arrivez au deux tiers de la partie la plus sympa de votre vie, il ne faut plus tergiverser : il y a des gens autour de moi qui sont partis trop vite, sans jamais avoir pu faire ce qu’ils souhaitaient vraiment. Et je vois encore nombre de personnes insatisfaites qui, depuis des années, se plaignent de leur vie sans rien faire pour que cela change. On a les cartes en main, à nous de jouer ! »
Découvrez le travail de Valérie sur son site http://www.photographevalerieladaviere.com/
Texte Corinne Martin-Rozès / Photos © Valérie Ladavière
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merci Valérie pour ce témoignage, effectivement, rien ne vaut le plaisir de se sentir à sa place et d’être vraiment soi-même ! Bravo pour ce changement de vie !
Ravie de voir une autre personne qui conjugue passion et travail 🙂
Bel article! Faire ce que l’on aime et faire briller l’étincelle!
Vive la décroissance c’est comme le courage ça rajeunit ! Philippe
merci pour cet article!!! bonne suite à cette photographe!