Traîner ses culottes courtes dans les musées, ça donne des idées ! Anne Carpentier a ainsi longtemps rêvé d’être conservatrice. Licence d’histoire, Ecole du Louvre, sa voie semblait toute tracée, mais la vie en a décidé autrement. Après quelques expériences professionnelles dans des institutions culturelles, elle reprend son indépendance et lance en mai 2012 un site internet proposant un service inédit : la chasse aux bonnes adresses. Aujourd’hui, sa petite entreprise va fêter son premier anniversaire et lui a ouvert de nouvelles portes. Si c’était à refaire…
Avant même de savoir marcher, Anne Carpentier arpentait déjà les musées, en poussette, aux côtés de ses parents, férus d’art et italophiles. « Le Nord, dont je suis originaire, est très riche en musées, nous avions donc de quoi faire ! Adolescente, je rêvais de devenir conservatrice, je n’imaginais pas autre chose » se souvient-elle. Après un bac littéraire, elle intègre la fac d’Arras pour une licence d’histoire, avant de réussir trois ans plus tard le concours de l’Ecole du Louvre, où elle suit un premier cycle puis une année de muséologie. « J’ai adoré cette période de ma vie : mon petit studio à Paris, les cours passionnants, les longues flâneries dans les musées, les balades sans fin dans les rues de la ville. Je suis véritablement tombée amoureuse de la capitale ». Son diplôme en poche, elle se met en quête d’un premier job et saisit sa chance : « l’assistante du patrimoine du Musée de Cambrai partait en congé maternité. Je l’ai remplacée pendant six mois, et à son retour, sa collègue a fait de même, j’ai donc enchaîné sur un second CDD. Une expérience géniale, avec à la clé la gestion des réserves, le prêt d’œuvres, les visites guidées, les ateliers avec les enfants et la mise en place de deux expositions ! ».
« J’ai fait le pari que ce stage m’ouvrirait les portes du Louvre »
Anne se met alors à la recherche d’un nouveau poste, mais hélas, l’offre est très limitée. Elle apprend que le Musée du Louvre cherche une stagiaire chargée du mécénat pour son projet de Louvre Lens. « J’ai fait le pari que cela m’ouvrirait les portes du Louvre et j’ai accepté ce stage de 6 mois… non rémunéré ». Banco, puisqu’à l’issue du contrat elle est embauchée par le musée. Elle garde un souvenir très enrichissant de cette période. « On m’a donné la chance de m’occuper du mécénat du Louvre-Lens, et notamment de gérer les négociations avec les principaux mécènes. J’ai également participé à l’organisation d’événements magiques : visite du musée la nuit à la lampe torche, dîner dans la cour Marly, concert privé dans les salles, soirées d’exception… Il n’y a pas beaucoup de métiers qui vous permettent de croiser Liliane Bettencourt et Valéry Giscard d’Estaing ! ». A l’issue de ce contrat, elle est engagée par un grand orchestre parisien pour gérer un cercle de mécènes. L’expérience se révèle décevante, ambiance panier de crabe et pics de stress. Elle s’accroche, mais la foi n’y est pas, et finit par reprendre sa liberté.
« J’ai décidé de tout remettre à plat dans ma vie et de créer mon entreprise »
« J’étais enceinte à ce moment-là… J’en ai donc profité pour lever le pied. A la naissance de mon fils, j’ai décidé de tout remettre à plat dans ma vie et de monter ma propre entreprise. Restait à trouver LA bonne idée ». Notre future créatrice analyse alors ses points forts, ses goûts et son mode de fonctionnement : l’histoire de l’art, les balades dans Paris, les artisans et petites boutiques qu’elle passe des heures à dénicher, les bonnes adresses qu’elle donne à ses amis… « Il existait hélas déjà tant de sites et de blogs qui mettaient en avant des lieux et adresses qu’il fallait absolument trouver une nouvelle accroche, quelque chose d’inédit ». Un jour, après avoir cherché (et trouvé) pendant des heures un bon cours de yoga post-natal sur Paris, elle se dit : « j’aimerais bien que quelqu’un cherche pour moi ce genre d’adresse, afin de ne pas vivre à chaque fois ce parcours du combattant ! » C’est le déclic. Voilà ce qu’elle va proposer : la chasse aux bonnes adresses.
« Je me suis lancée à fond dans l’aventure »
Nous sommes en décembre 2011. Son compagnon, ses parents, ses amis proches lui disent : fonce ! Pleine d’enthousiasme, Anne s’inscrit à une formation à la Maison de la Création d’Entreprise. Elle y apprend ‘’la base du métier’’ de créateur d’entreprise, à savoir les nécessaires notions de gestion, marketing et comptabilité qu’il faut connaître avant de passer à l’action. En février, elle opte pour le statut d’auto-entrepreneur et se met à travailler sur son site internet. Parallèlement, elle affine l’organisation de son carnet d’adresses, qui comprend déjà quelque 7 000 entrées… Le 16 mai 2012, le site ‘’Mon Chasseur d’Adresses’’ est mis en ligne et l’aventure démarre officiellement. Il faut alors se faire connaître, tout en continuant à prospecter les bons plans. « Quand on débute, on fait tout soi-même : commercial, community management, traitement des commandes, gestion, facturation… » Anne ne compte pas ses heures, elle est à fond dans son projet. « Il y a quelques mois, j’ai pris une attachée de presse et j’ai commencé à avoir des parutions prestigieuses : Télématin, Le Monde… Autour de moi, les gens sont positifs et m’encouragent à continuer. Leur soutien est déterminant car les choses ne se font pas en un jour, il faut être patient et persévérant ». Le buzz démarre et, petit à petit, Anne fait son nid. Elle commence à collaborer cet automne, sous la forme d’une rubrique, au magazine Palace Costes. En décembre, le très branché Brunch Bazar lui ouvre grand les bras. Et début 2012, elle intègre l’équipe de John Paul en tant que responsable des contenus : animations pour les membres et clients, adresses insolites et événements incontournables… Le tout en parallèle de Mon chasseur d’adresses, qui n’a pas dit son dernier mot.
« Le véritable échec, c’est d’avoir peur de l’échec »
Son énergie, Anne la puise dans la course, activité qu’elle a reprise l’été dernier. « Cela me fait un bien fou : les endorphines, y’a que ça de vrai ! Mon autre moteur, ce sont mes chasses bien sûr. Au-delà des tables romantiques, qui constituent une des premières demandes de mes clients, je suis amenée à chercher toutes sortes de choses : un restaurateur de tableaux contemporains, une bonne charcuterie corse, un cordonnier spécialisé dans les santiags, une housse originale pour un iPad, etc. Cela débouche souvent sur des découvertes magiques. J’aime et je respecte profondément les artisans et je suis heureuse de leur faire un peu de publicité. Dans les médias, on parle beaucoup de mode et de beauté, mais on met trop peu en lumière le talent et le savoir-faire des artisans » estime-t-elle. Où elle se voit demain, dans dix ans ? « Aucune idée. Quand j’étais plus jeune, j’étais du genre à tout programmer. Ado, je m’imaginais trentenaire, mariée, mère de famille et travaillant dans un musée. Aujourd’hui, à 31 ans, j’ai appris à aimer l’inconnu, je ne me projette plus : j’agis et je verrai bien ce qui en découlera. Ce que je peux donner comme conseil ? Il faut s’écouter, s’analyser pour trouver ce qui nous correspond et ensuite, aller de l’avant, quitte à créer son métier si l’on ne trouve rien qui convienne. Car le véritable échec, c’est de ne rien entreprendre ».
Découvrez le site créé par Anne : http://www.monchasseurdadresses.com/
Texte Corinne Martin-Rozès / Illustration © Maud Benaddi / Photo © Pauline Darley
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Catégories :Parcours atypique
quel parcours…tout simplement bravo…..
un bien joli parcours (et proche du mien à la base ;o) )